Faire prospérer les PME

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Les entreprises françaises se caractérisent par un grand nombre de petites entreprises (95% entre 1 et 9 employés) et un petit nombre d’entreprises au-delà de 250 employés (1%). Cette situation révèle un handicap de notre économie, celui de la difficulté des PME à grandir.
Le poids des PME est plus modeste si on mesure en termes d’emplois des salariés (47%), de valeur ajoutée (44%) ou d’exportations (15,5%). « Dans l’industrie manufacturière, les entreprises françaises sont relativement grandes dès leur naissance, tandis que les entreprises plus âgées ne sont pas plus grandes. Ceci suggère qu’il existe, d’une part, des barrières à l’entrée nécessitant d’atteindre d’emblée une taille critique, et d’autre part, des obstacles important à l’expansion de ces entreprises. ».

D’après la Commission Européenne, les PME ont assuré la création de 85% de la création nette d’emplois dans l’Union européenne entre 2002 et 2010. En France, entre 1995 et 2009, les entreprises de moins de 5 ans ont créé 173 000 emplois par an en moyenne, contre une destruction moyenne annuelle de 129 000 pour les entreprises de plus de 5 ans. Si l’on enlève le régime des auto-entrepreneurs, la France ne crée pas plus ou ne détruit pas plus d’entreprises en moyenne. Il ne faut donc pas s’intéresser à leur nombre mais à leur devenir.
Le potentiel d’expansion des PME est un enjeu majeur ; d’une part les grandes entreprises sont plus productives grâce aux rendements d’échelle, et d’autre part, les gains de productivité sont dus au différentiel de croissance entre les entreprises. Ce qui est important, c’est que les entreprises ayant de forts gains de productivité puissent grossir plus vite, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Les PME jeunes sont souvent innovantes, mais voient leur rentabilité diminuer en vieillissant ; ce phénomène est d’autant plus marqué qu’elles n’ont pas réussi à grandir.

Les effets de seuils
Le reproche est souvent fait aux seuils, considérés comme non pertinent. En effet, une entreprise en croissance n’a pas la même productivité qu’une entreprise sur le déclin. Le CAE lui préfère le critère d’ancienneté : ce sont les entreprises les plus jeunes qui sont les plus productives et les plus créatrices d’emplois.
« Même si la surreprésentation des entreprises de 49 salariés et la sous-représentation de celles de 50 salariés font l’objet de débats entre experts, plusieurs études concluent à un effet substantiel du seuil de 50 salariés sur le coût du travail, la productivité et l’emploi. ». Le CAE propose ainsi une période de 3 ans pour s’adapter aux nouvelles obligations liées au franchissement des seuils. Les dispositifs trop contraignants en matière de franchissement de seuil provoquent un découpage d’une entreprise en plusieurs petites, ce qui seraient moins avantageux avec un critère basé sur l’âge.

Une juste allocation des ressources
De même, se pose le problème de la bonne allocation des ressources, qu’elles soient humaines ou financières. Une plus grande facilité offerte aux PME sur leur politique salariale est ainsi préconisée.
« Le marché du travail français se caractérise par une majorité de travailleurs sur des emplois stables en CDI […]. Cette dualité n’est pas favorable à une réallocation vertueuse des travailleurs aux emplois. En effet, les travailleurs en CDI ne sont pas incités à prendre des risques, tandis que ceux en CDD n’ont pas accès à la formation professionnelle qui leur permettrait de véritablement participer à une montée en gamme du système productif. »

Les PME souffrent davantage de cette situation, qui leur pose des difficultés de recrutement (plus de la moitié des emplois vacants se trouvent dans les entreprises de moins de 10 salariés). De plus, elles ont moins recours à la sous-traitance ou à l’intérim. « Les petites entreprise ont été les premières à baisser leurs effectifs pendant la crise » . Enfin, l’épaisseur du code du travail, l’insécurité juridique et économique liée aux licenciements… pèsent davantage sur les PME, moins armées pour maîtriser ces questions.
Les entreprises de petite taille ont une maîtrise limitée de leur politique salariale, celle-ci étant largement déterminée au niveau des branches ou au niveau de l’Etat. « Les entreprises à forte croissance sont généralement plus jeunes et de plus petite taille que la moyenne. Celles-ci offrent des salaires inférieurs aux plus grandes entreprises au début de leur cycle de vie, du fait notamment de contraintes financières plus fortes au moment où elles sont encore au stade du développement de leurs produits et d’exploration de débouchés. En réalisant des gains de productivité, elles peuvent ensuite prospérer et adopter une politique salariale plus dynamique. Cependant plusieurs études empiriques ont montré que des contraintes de salaires conventionnels fortes, ne tenant pas compte des évolutions de productivité des jeunes entreprises, peuvent être préjudiciables à leur développement pendant les toutes premières années. »

La question de l’imposition et des délais de paiement
Le régime actuel de transmission des entreprises peut être critiqué, car il favorise la transmission au sein de la famille. Or, selon les études, rien n’indique qu’une entreprise fonctionne mieux : au contraire, la rentabilité est plus faible et le risque de faillite plus élevée en cas de transmission intrafamiliale.
Les retards de paiement, où la PME joue le rôle d’amortisseur permettant au grand groupe de réduire son fonds de roulement, représentent un quart des faillites des PME. Les retards des collectivités publiques se sont d’ailleurs globalement allongés depuis 2011.

Assurer une concurrence plus équitable entre PME et grandes entreprises
Le Conseil des prélèvements obligatoires et la DG Trésor ont montré que les PME étaient les entreprises les plus taxées. « En effet, les plus petites entreprises sont plus souvent sujettes au taux réduit d’IS de 15%. En revanche, les PME dépassant ces seuils voient leur bénéfice imposé au taux implicite de 32 % de l’excédent brut d’exploitation, contre 26 % pour les ETI et 22 % pour les grandes entreprises. ». Ce n’est pas la taille qui compte, mais le statut de multinationale et les possibilités d’optimisation fiscale qu’il permet.
La piste d’exonération de l’IS (à la différence de l’impôt sur la production) pour les petites entreprises n’est pas la plus porteuse, les jeunes entreprises ne faisant pas ou que peu de bénéfices les premières années. Le principe du suramortissement est quant à lui plus prometteur ; il s’agit d’une subvention à l’investissement en fin de compte.

La simplification administrative
De nombreux rapports relèvent que la règlementation en France s’accompagne de procédures trop complexes et trop lentes. Cette lourdeur génère des coûts, dissuade l’investissement et pèse sur la compétitivité. À ce titre, les systèmes anglais (one in / one out) ou américain (sunset clause) sont intéressants.

Les PME et la commande publique
Les PME françaises ont davantage accès à la commande publique que les autres PME de l’UE. Il faut dans ce cadre poursuivre l’effort de transparence et de simplification des procédures pour faciliter leur candidature.

Résumé de « Faire prospérer les PME – Les notes du CAE »


Clément Delaunay