Pierre Claverie est né à Bab El Oued en 1938. Il devient évêque d’Oran en 1981. Après les moines de Tibhirine quelques semaines plutôt, il est à son tour assassiné en 1996.
Le livre porte sur les éléments constitutifs de l’Islam, et les liens qui peuvent exister avec les autres religions, notamment chrétiennes.
L’islam : une communauté
Pour l’auteur, l’islam apparaît d’abord comme une communauté, l’Umma, dans laquelle il existe pour tous des principes et des lois de vie communs. Il distingue ainsi, à la manière de Mohamed Talbi, « l’islam-culture », qui est un ensemble structuré religieusement et politiquement (une nation État), de « l’islam-conviction » qui est une communauté de foi, un ensemble géopolitique.
« L’islam n’a pas plus de couleur que l’eau : il se colore des terroirs et des pierres ».
Amadou Hampate Bâ
Pour Pierre Claverie, l’islam est une religion qui ne connaît pas le doute. Il s’agit au contraire d’une vérité révélée, d’une alliance renouvelée entre Dieu et les hommes, par-delà le judaïsme et le christianisme. Cette vérité, inscrite dans le Coran (et dans les haddiths), est totalisante. Et c’est là une différence fondamentale avec le christianisme, où l’ordre politique est distinct de l’ordre religieux[1], là où, dans l’islam, il forme un tout, définissant la place et le rôle de chacun.
Un livre : le Coran
Un livre, le Coran, a des usages très codifiés et le psalmodier revient à se mettre en présence de Dieu. Il contient 114 sourates (et 6236 versets) classées par taille décroissante et dans l’ordre inverse dans lequel elles ont été révélées. La tradition musulmane a éprouvé très tôt le besoin d’éclaircir le sens de certaines d’entre elles, par les haddiths – les paroles rapportées des compagnons du Prophète.
Les références aux autres livres (ou aux religions DU Livre) sont régulières dans le Coran, avec les 3 « âges » de la même religion. Abraham et Moïse seraient les premiers prophètes (enfance), Jésus serait le continuateur (adolescence) et Mahomet celui qui permettrait d’entrer dans l’âge adulte. Il y a là le point majeur des difficultés de dialogue inter-religieux. Du côté musulman, les patriarches (Abraham et Moïse) et le Christ sont appelés « prophètes ». Le Coran est l’aboutissement d’un processus, confirmé par la reprise des textes passés. Les Évangiles seraient davantage des haddiths que la parole de Dieu inscrite dans le Coran. Du côté chrétien, le Christ n’est pas seulement un prophète, mais il est fils de Dieu et ses paroles incarnent à ce titre la Parole divine. Celle-ci est si puissante qu’elle ne peut être réduite à un livre.
Selon l’auteur, « nous devons ainsi reconnaître dans [Mahomet] un souffle prophétique analogue à celui qui inspirait les prophètes bibliques. Mais nous confessons que Jésus-Christ n’est pas seulement un prophète […] mais la Parole même venue de Dieu dans le monde ».
Le mot « islam » signifie « s’abandonner » entre les mains de Dieu, et par extension, partager la vie de la communauté, en respecter les lois, et attester que « il n’y a d’autre divinité que Dieu, et Mahomet est son prophète ». Fort de sa foi, le musulman emprunte une voie tracée par Dieu ; le chrétien, lui, doit créer la voie, fort de l’amour de Dieu et « improviser l’Histoire ».
La Sunna
La Sunna est la loi de vie des musulmans. La Loi est notamment constituée par 5 piliers fondamentaux que sont :
- La profession de foi (chahadat)
- La prière rituelle (salât)
- L’impôt / l’aumône (zakat)
- Le Ramadan (sawn)
- Le pèlerinage (hajj)
Les différents piliers sont intimement liés, et notamment la prière et l’aumône, cités fréquemment ensemble dans le Coran. L’auteur ne mentionne pas le lien qui pourrait être fait ici avec le Christ. Cependant, on pourrait rajouter ce parallèle avec les Évangiles où dans les deux cas, on rappelle l’importance de se tourner vers Dieu, et vers son « prochain ».
« Jésus lui répondit : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit.
Matthieu, 22 : 37-40
Voilà le grand, le premier commandement.
Et le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même.
De ces deux commandements dépend toute la Loi, ainsi que les Prophètes. »
On pourrait également faire le lien avec les œuvres de
miséricordes.
[1] On rappellera à cette occasion la distinction faite par le Christ selon laquelle « il faut rendre à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ».